« On n’a jamais deux fois l’occasion de se faire une bonne première impression. » Cette boutade m’interroge. Prenons le temps de la relire car elle est effectivement à tiroir.
Elle exprime d’abord une évidence : on n’a jamais deux fois une première fois. Et pourtant : nous nous réfugions-nous assez fréquemment dans un « je ferai mieux la prochaine fois », refusant une relecture à chaud qui nous inciterait à modifier immédiatement notre comportement. Combien d’occasions n’ont-elles pas été perdues par nos procrastinations ! Et inversement, notre humanité n’a-t-elle pas évolué grâce à ces appels comme ceux de Jésus, de de Gaulle ou de l’abbé Pierre – pour ne citer qu’eux – qui ont déclenché des engagements surprenants par leur spontanéité et leur audace ?
Ensuite, il s’agit de bonne impression. Cette formule est risquée car l’adjectif bon n’est pas clair. Il peut évoquer la morale ; est bon ce qui est conforme à l’éthique : un positionnement, un engagement, une affirmation, une conviction ou encore un jugement. Mais bon peut tout aussi bien évoquer des sensations (le plaisir), des perceptions (« bon œil »), une réflexion (intelligence), un sentiment esthétique ou amoureux. Bon peut s’appliquer à la manière, aux dispositions, aux talents, mais aussi aux objets évoqués. Notre tendance naturelle considère comme bons, les objets que nous connaissons et apprécions.
L’impression, dans ce contexte, est un ressenti un peu vague, mais précis. Vague, car on ne saurait définir ses contours ou son relief ; mais précis, car son message est clair, presque binaire : l’impression est bonne ou mauvaise, avec des degrés, certes, mais nettement polarisée. Et si le doute est là, un changement de perspective fait basculer l’impression d’un côté ou de l’autre.
La netteté d’une photographie en révélant certains détails permet de rentrer dans l’atmosphère de la scène photographiée. Une première bonne impression est de cet ordre, associant netteté et atmosphère. La définition du grain photographique est un présupposé essentiel de l’atmosphère de la photo. Mais c’est bien l’atmosphère qui en dégage l’impression.
Je retiens deux leçons. Il n’est jamais trop tôt pour faire du bien : exprimer une proximité, répondre à un courrier, ranger tel coin ou jeter tel encombrant. Car effectivement, l’occasion de le faire ultérieurement, comme l’expérience nous l’enseigne, peut ne plus se représenter ou alors dans un avenir bien lointain…
L’autre leçon est dans l’analyse nécessaire d’un ressenti : savoir distinguer ce qui le permet (le degré de netteté) de ce qu’il évoque (l’impression). Car sur ce plan, effectivement, la fraîcheur du contexte ou de l’environnement lors de la première fois est déterminante. Cette fraîcheur ne se retrouvera pas les fois suivantes.
Chacun accorde à ses impressions l’importance qu’il veut bien et les gens instruits sont souvent encombrés par leur rationalité. De même, entre passé et futur, chacun gratifie son présent d’une valeur originale. Que notre motivation ici et maintenant puisse trouver sa juste dynamique dans la valeur de nos premières impressions.
Daniel DUBOIS
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