Archives mensuelles : janvier 2014

Pédagogie

J’ai considéré pendant longtemps que nos enseignants, plus ils enseignaient haut dans le cursus depuis l’école maternelle jusqu’à l’enseignement supérieur, moins ils étaient formés à la pédagogie. C’est un lieu commun. Récemment encore, dans le même ordre d’idées, un jeune agrégé de philosophie essayait de me faire partager sa conviction que la pédagogie ne s’apprenait pas. C’était un don. Certains professeurs l’avaient, d’autres ne l’avaient pas. Voilà tout.

Et successivement ces jours-ci, j’entends parler de l’Institut Français de l’Éducation rattaché à l’ENS de Lyon, par leur site de formation des enseignants de l’Éducation Nationale, NéoPass@ction, et de Luc Ria (La Croix du 17 janvier 2014, p. 28 : « Un chercheur aux côtés des jeunes ‘profs’ »). Un tout autre discours : « En matière d’enseignement, je ne crois pas à l’inné. Tout se construit, tout s’apprend. »

Luc Ria inspire une confiance efficace. C’est un homme de terrain, proche de ces jeunes enseignants lancés sans aucune précaution dans l’arène des collèges et lycées des banlieues, désormais directeur de la première chaire de l’UNESCO consacrée à la formation des enseignants. Ancien professeur lui-même (agrégé d’éducation physique), il s’est reconverti dans l’enseignement de la pédagogie.

J’apprécie particulièrement quand il affirme que « plus que tout autre métier, l’enseignement exige une perpétuelle remise en question… Il en va de l’épanouissement des professeurs. » J’ai déjà évoqué dans ces lignes mon contact avec l’enseignement supérieur il y a quatre ans, après plus de quarante ans à fréquenter professionnellement des entrepreneurs, des commerçants, des industriels et des managers : deux mondes complètement différents, dont je vois mal aujourd’hui comment ils pourraient travailler ensemble. Et si j’ai décidé d’arrêter mes études de philosophie après avoir obtenu ma licence, et malgré l’insistance de certains de mes professeurs, c’est en grande partie à cause de cette absence de remise en cause qui s’exprime chez certains enseignants par une espèce d’insolence décalée, stérile, en contradiction totale avec l’objet même de leur enseignement.

Mes idées et ressentis sont peu de choses face aux enjeux d’épanouissement de nos formateurs. Mais je suis gré, aujourd’hui, à Luc Ria de m’apporter une forte espérance. Voilà une initiative qui doit se développer et faire des petits. Je pense, en particulier, au métier de parents dont je suis convaincu qu’il s’apprend lui aussi, comme la tenue des rôles de conjoints dans un couple. Tous nos beaux discours sur la famille, sur le père, sur la mère et sur les enfants, risquent de tomber dans l’idéologie si un effort précis d’apprentissage n’est pas proposé aux intéressés. Il faut leur apprendre à voir les réalités du monde actuel, accepter de se remettre en cause, vouloir être épanoui au-delà des plaisirs faciles et éphémères. C’est très certainement une des urgences de notre temps que d’accompagner des jeunes parents dans leur apprentissage d’éducateurs. Accompagner des jeunes… et des moins jeunes, aussi. Parole de grand-père.

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