14 février : St Valentin, Saints Cyrille et Méthode

Je m’intéresse très souvent aux saints qui sont fêtés par l’Église catholique chaque jour du calendrier. Je précise catholique, car les protestants n’ont pas le culte de saints, et les orthodoxes ont un calendrier des fêtes souvent différent du nôtre. Les saints nous font voyager à travers l’histoire, les cultures, les civilisations. Ils nous font découvrir aussi une foi vécue dans des contextes très variables, dans le confort ou dans la persécution. Cette fréquentation me fait relativiser le poids de nos évènements ou le choc des décisions politiques. Parfois on tombe sur une pépite, comme aujourd’hui où nous fêtons Cyrille et Méthode, deux frères du 9e siècle, et Valentin, un évêque du 3e siècle connu pour ses dons de guérisseur.

Valentin vivait discrètement sa foi chrétienne. Il fut trahi par un miracle indépendant de sa volonté, quand il soutenait ses frères chrétiens emprisonnés. Cela le conduisit au martyre. Deux cents ans plus tard, le pape Gélase 1er, décida de le fêter le 14 février. Les anciennes fêtes païennes romaines étaient officiellement supprimées, mais une dernière persistait le 15 février en l’honneur d’un dieu de l’amour et de la fécondité, ce qui explique très certainement sa pérennité populaire. Le succès (déjà !) de la St Valentin accéléra la disparition de la dernière fête païenne. Voilà sans doute pourquoi le guérisseur Valentin déclaré saint par l’Église, se retrouva patron des amoureux avec le retentissement médiatique que l’on sait…

Cyrille (+869) et Méthode (+885), sont deux frères de culture grecque, de Byzance précisément. Envoyés évangéliser les Slaves, ils en apprennent la langue et les coutumes, et créent un alphabet pour traduire la Bible et les textes liturgiques (L’alphabet cyrillique actuel a été inventé par un de leurs successeurs, qui s’était mis sous le patronage de Cyrille pour avoir plus d’autorité). Ils furent sérieusement tracassés par les évêques locaux les traitant d’hérétiques. Car à cette époque on avait eu tant de mal à mettre la foi en mots que toute traduction avait une odeur de souffre. Mais, nos deux missionnaires seront défendus et réhabilités par le pape Hadrien II. Récemment, en juillet 2009, ils ont été nommés par Benoit XVI, patrons chrétiens de l’Europe, avec St Benoît, Ste Catherine de Sienne, Ste Brigitte de Suède et Édith Stein.

La simultanéité de ces deux commémorations est étonnante. Avec Valentin, une fête païenne, la dernière et malgré sa grande popularité, est supplantée par une fête chrétienne. L’inconscient collectif des romains est confronté à une rupture : tout un univers symbolique porté par leur ancienne religion, disparait, purement et simplement et la chrétienté se pose en successeur incontestable. Valentin, patron des amoureux, invite alors à vivre l’amour conjugal dans l’intimité des cadeaux, l’intimité du partage. Finie la liesse populaire !

Avec Cyrille et Méthode, le processus est inverse : la culture locale se fait accueillante de la culture chrétienne. Les missionnaires prennent le risque bien réel de mettre en mots slaves, et la Bible, et la liturgie. Succès populaire ici au détriment des théologiens parlant grec. L’Église propose aujourd’hui ces missionnaires comme modèles et protecteurs de l’Europe, symbole de la diversité des cultures et de leur complémentarité.

Mais, ces deux commémorations le même jour, rappellent surtout à tout philosophe qui sommeille en chacun, l’universalisme des valeurs humaines chrétiennes liées à l’amour et à la connaissance (les chrétiens, dans la foi, y voient davantage, mais cela nous faisant sortir de la philosophie, « ne nous regarde pas » ici).

Ce contraste et cet universalisme me font penser à une pépite. Un petit trésor. Rassurant.

D. Dubois

(Je me suis largement inspiré de la page d’accueil du 14 février du site [http://nominis.cef.fr]).

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